Témoignage de Gift : trajectoire d’une femme migrante

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Gift est arrivée en France en 2012 à l’âge de 20 ans après avoir laissé derrière elle sa mère et ses frères dans son pays d’origine. Depuis, elle a été piégée par un réseau de prostitution, endettée, emprisonnée. Mais sa force de caractère, son envie de protéger ses proches et la rencontre avec l’association MANA du Groupe SOS lui permettra de reconstruire sa vie. Trajectoire d’une jeune femme hors norme, que la France doit être fière d’accueillir sur son territoire.

 

 

Gift a grandi au Nigéria, dans une famille qui lui a permis de faire des études au lycée privé, de pratiquer des activités sportives et d’avoir une enfance heureuse aux côtés de ses deux frères. Son père était officier dans la police. Mais à l’âge de 12 ans, il est décédé et sa famille s’est retrouvée progressivement sans ressources. Gift, passionnée de football, rêve de suivre des études de sciences politiques, mais en tant que fille ainée elle s’impose l’objectif de subvenir aux besoins de sa famille. A la recherche d’un travail dans sa ville, une amie obtient pour elle un rendez-vous professionnel. L’homme qui la reçoit lui propose d’émigrer en Europe où un emploi et un logement l’attend. Elle sait seulement qu’elle aura une dette à rembourser. Mais l’homme lui assure qu’elle pourra en même temps envoyer de l’argent à sa famille. Gift décide de partir, et s’envole vers la France. A son arrivée à l’aéroport, on la conduit dans un appartement où elle fait la connaissance d’une femme : sa « Mama ». On lui remet des vêtements et lui annonce que sa dette s’élève à 55 000 euros et qu’elle va devoir travailler pour rembourser. Elle se retrouve dans la rue, seule et comprend qu’elle est prise au piège. Des années de rue, de prostitution et de galères. Elle travaillera de 2012 à 2017. Jamais elle n’essaiera de fuir, sachant qu’elle mettrait sa famille en danger si elle ne remboursait pas la dette. Grâce à l’aide d’associations, elle obtient sa demande d’asile pour traite humaine et bénéficie d’un titre de séjour.

Mais ce n’est pas la fin des ennuis pour la jeune femme. En 2017, elle rencontre une jeune fille migrante et tente de lui venir en aide lui offrant une petite somme d’argent. Mais lors d’une descente de police, cette jeune fille donne le nom de Gift au lieu des têtes de réseau qui l’ont emmenée à cette situation, et elle se fait arrêter. Gift se retrouve alors sur les bancs du tribunal et refuse de dénoncer ses bourreaux. Elle craint pour la vie de ses proches restés au Nigéria. Sa dette n’est plus très loin d’être remboursée. Pour la jeune femme, la famille est sacrée et la protéger est sa priorité. Gift insiste : « J’ai dit la vérité. Je ne voulais pas mentir. Ma seule chance de m’en sortir c’était de dire la vérité ».  Un principe qu’elle n’a jamais lâché, malgré le prix que lui a coûté cette vérité. Elle en est fière aujourd’hui.

Condamnée à 3 ans d’emprisonnement dont 1 an ferme, Gift fait preuve d’une résilience hors norme et purge sa peine. Une femme française l’aide et lui rend visite en prison, ce qui l’aide à tenir. Elle sort de prison en juin 2019, mais reste sous contrôle judiciaire et porte un bracelet électronique. L’association MANA lui propose alors un programme d’accompagnement personnalisé et l’accompagne dans ses démarches. Déchue de ses droits et notamment de son droit d’asile, les travailleurs sociaux l’accompagnent dans sa nouvelle demande d’asile. Mais aujourd’hui, même sans papier, elle est libre et fière d’avoir résisté pour préserver son honneur et celui de sa famille.

Malgré sa situation précaire, et le fait qu’elle n’ait ni logement ni emploi, elle reste déterminée à construire sa vie ici, en France. Elle rêve de fonder une famille, de se marier et d’avoir sa propre maison. Elle raconte : « MANA m’a aidé à me relever, à comprendre qui j’étais. Ils m’ont donné les clés pour m’intégrer, m’ont permis de découvrir la culture et la langue française. Les rencontres avec les autres femmes accompagnées par MANA m’ont aidé à accepter mon histoire ». Désormais, Gift souhaite partager son témoignage pour aider et conseiller les autres femmes dans sa situation.

 

En cette Journée internationale des migrants, le Groupe SOS souhaite lui permettre de partager son témoignage pour montrer le visage et la force d’une jeune femme hors norme, que la France doit être fière d’accueillir sur son territoire. Cette journée est aussi l’occasion de rappeler que ces enfants, ces femmes et ces hommes qui arrivent sur notre territoire, ont des droits qui doivent être respectés, et que le bon fonctionnement des dispositifs d’accueil sont essentiels pour réguler au mieux la crise migratoire. A travers le témoignage de Gift, nous souhaitons avoir l’opportunité de casser les préjugés de certain·e·s, qui assimilent bien trop souvent les migrant·e·s aux maux de notre société.

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